Le livre… un objet durable mais périssable

Il y a plus de 5 000 nouveautés BD qui sortent chaque année, soit plus d’une dizaine d’albums par jour. Vous vous doutez bien que les rayons des libraires ne sont pas extensibles et, non seulement ils ne peuvent pas accueillir toutes les nouveautés mais, en plus, ils ne peuvent pas garder un titre pendant des mois (sauf exceptions avec des valeurs sûres).

Les stocks sont aussi limités en place, ce qui explique, que, quand vous vous rendez chez un libraire et cherchez un titre spécifique, il n’y a pas forcément la garantie qu’il soit là (alors, oui, sur de grandes plateformes numériques, vous pouvez trouver le titre tout de suite et même l’avoir le lendemain mais sauf urgence vitale, la patience permet de préserver les commerces de proximité).

Alors, concrètement, cela veut dire quoi ? Pour avoir des éléments plus précis, Bertrand, de la librairie L’intrépide (le Mans), nous a communiqué différents éléments. Il nous explique qu’entre le flux des nouveautés, présentes en boutique, les goûts du libraire, du public, les retours de la critique, la présence d’un album en librairie peut être très, très courte… D’une journée à un mois. Bien évidemment, ces dates sont différentes d’une boutique à l’autre, cela dépend aussi de la place, des habitudes de la clientèle, des relations avec les représentants commerciaux, mais cela vous donne déjà une idée. 

Bien sûr, lors des coups de cœur des libraires ou de bonnes ventes, les ouvrages peuvent rester plus longtemps mis en évidence. 

Une fois cette période passée, l’album est soit renvoyé (les retours), soit stocké (le fonds)… Pour être rentable, un album « stocké » doit avoir plusieurs ventes annuelles (le scénario idéal étant une vente par mois minimum, sinon plus de deux par an). Quand le libraire n’a plus l’ouvrage dans ses rayons ou dans son fonds, il peut néanmoins le commander.

Cela veut donc dire qu’un album se retrouve avec une durée de vie limitée en terme de visibilité et une fois cette période passée (qui peut être courte, comme vous avez pu le constater), l’album peut disparaître totalement des radars. Est-ce que l’éditeur va continuer à le défendre ? Est-ce qu’il sera bien visible dans les catalogues ? Est-ce que l’éditeur va le réimprimer si besoin ?

Pour les autrices et auteurs, c’est des mois de travail, parfois même des années, qui se jouent sur ces quelques journées : il suffit de peu de choses pour rendre invisible un livre pourtant de qualité… Une actualité chargée, une presse peu réceptive, une sortie durant une crise sanitaire, de mauvais concours de circonstances. Bref, quand un livre vous plaît (et que les finances le permettent bien évidemment), donnez lui sa chance le plus tôt possible.

Défendre un livre dans la durée : une solution

Le système Ant Editions reste largement perfectible (heureusement d’ailleurs, sinon, on s’ennuierait ^_^). Néanmoins, on essaye vraiment de sortir de cette spirale pour défendre réellement, dans la durée, les projets édités.

Comme nous l’avions déjà expliqué dans un précédent article, les campagnes de prévente permettent d’ajuster le tirage initial et d’avoir une trésorerie nécessaire pour sortir plus de livres que prévu, en anticipant aussi le coût de leur stockage.

Idéalement, il serait parfait pour nous d’avoir un maximum de libraires qui prennent nos livres et qui les gardent en rayon… Mais bon, tout cela ne dépend pas que de nous, ni même des libraires. Notre système ne permet pas non plus d’avoir une réelle politique de retours, ce qui freine aussi de possibles commandes. Cela nous ferait prendre de trop gros risques financiers, au risque de la survie de la structure éditoriale. 

C’est pour cela que nous avons fait des choix différents concernant les pratiques éditoriales : Ant Editions sort très peu d’albums par an, la logique étant d’avoir à la fois le temps nécessaire pour défendre le projet correctement mais également les finances pour le faire. La boutique en ligne et le maintien d’un stock d’albums permet d’assurer en parallèle les commandes des lectrices et lecteurs et de continuer de pouvoir approvisionner les libraires (commandes clients, fonds). 

Permettons donc aux livres de durer dans le temps et, par conséquent, de soutenir le travail des autrices et auteurs.

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